La société soviétique sous Staline
Alors que le monde entier s'enfonce dans la Grande Dépression, l'URSS des années 1930 ignore le chômage et sort spectaculairement de son système archaïque, sans même l'aide de capitaux étrangers. Elle accouche d’ une société radicalement inédite, non-capitaliste, dont la nature est très contesté à l'extérieur. En 1936, la «constitution stalinienne»(La constitution soviétique de 1936, adoptée le 5 décembre 1936, et aussi connue sous le nom de «Constitution Staline», redéfinit le gouvernement de l'Union soviétique. La constitution supprima les restrictions de vote et ajouta le suffrage universel direct aux droits garantis par la constitution précédente. En outre, la constitution reconnut les droits collectifs sociaux et économiques, non reconnus par les constitutions des pays capitalistes à cette époque, parmi lesquels les droits au travail, au repos et au loisir, la protection de la santé, le soin aux personnes âgées ou malades, le droit au logement, à l'éducation et aux bénéfices culturels. La constitution permit aussi l'élection directe de tous les corps gouvernementaux et leur réorganisation en un système unique et uniforme.)proclame même la disparition effective des classes sociales en URSS.
Une population entre modernisations...
L'industrialisation est un succès relatif. L'URSS se dote d'une gamme complète d'industries nationales et comble en partie son retard sur l'Occident. Le stakhanovisme permet d'introduire en usine une version soviétique  du taylorisme et du fordisme qui sont tout les deux caractérisés par une division du travail, une standardisation et une hausse des salaire, ces changements au sein de l’entreprise accroissent la productivité et la production même si le fordisme a quelque variante par rapport au taylorisme. La production se développe, même entravée par la lourdeur bureaucratique, par la méfiance du stalinisme envers les spécialistes et les techniciens, ou par les fréquents revirements liés aux purges politiques.
Les succès sont suffisamment positifs pour intéresser les autres pays, y compris aux États-Unis où certains tiennent l'économie planifiée façon soviétique comme un modèle de développement. Le système stalinien est donc un relatif succès… du point de vue capitaliste.


Usine de tracteurs, années 1930.
Dans les campagnes, l'effort considérable de mécanisation et d'électrification n'existe pas que dans la propagande. Malgré les dysfonctionnements nés de l'inexpérience, des incuries ou des hâtes, la modernisation du monde rural progresse après le choc de la dékoulakisation
Prolongeant les efforts des années 1920 , le régime fait reculer massivement l'analphabétisme , passé de 43 % à 19 % entre 1926 et 1939. Il consent un effort immense pour l’enseignement primaire, l’Université et la formation professionnelle. Les enfants scolarisés dans le primaire passent dans les années 1930 de 11 à 30 millions, les élèves du secondaire de 3 à 18 millions. Partout les écoles de formation pour adultes se multiplient. Le nombre d'ingénieurs croit de façon exponentielle, et la frénésie d'études des Soviétiques comme leur amour de la lecture sont notés par tous les observateurs[]. L'URSS apprend à se passer des spécialistes étrangers (spetz), progressivement éliminés: le dernier disparaît en 1934.
Cependant, l'éducation renoue avec le conservatisme et l'académisme: les innovations pédagogiques de l'ère léninienne sont désavouées dès 1932, tous les manuels scolaires révisés (décret du 16 mai 1934).

Aciéries de Magnitogorsk,année 1930
La  classe ouvrière passe de 11 à 38 millions de membres entre 1928 et 1934 . L'urbanisation progresse considérablement: à la fin du Ier Plan, les villes sont passées de 18% à 32% de la population. Mais cette explosion anarchique s'explique avant tout par l'afflux incontrôlé de 25 millions de paysans chassés des campagnes. Moscou passe ainsi de 2 à 3,6 millions d'habitants en quelques années. À titre d'exemple encore, Sverdlovsk, dans l'Oural industriel bondit de 150 000 à 3 600 000 habitants, et des villes nouvelles entières surgissent du désert: ainsi Magnitogorsk, ou encore, grâce au Goulag, Karaganda et Magadan
… et pénuries
Au début des années 1930, la dékoulakisation a entraîné la fuite anarchique et imprévue de 25 millions de ruraux. Les villes soviétiques explosent et se peuplent de marginaux, de vagabonds et de sans-abris. Dans les villes nouvelles industrielles, bien des ouvriers vivent dans des baraquements insalubres et surpeuplés. Beaucoup de villes souffrent du manque d'hygiène, de sécurité, d'infrastructures, de transports en commun.
La population citadine doit s'entasser dans les kommounalka, ces appartements collectifs apparus après 1917, et qui hébergent plus de 80% des citadins, souvent à une famille par pièce. Dans bien des logements, la promiscuité forcée nuit à la vie privée, favorise les tensions quotidiennes et facilite souvent la délation.
Autre conséquence de la collectivisation et des famines, l'URSS s'installe dans les pénuries alimentaires chroniques. Le beurre, la viande, le lait, les œufs deviennent introuvables, le pain et tous les produits courants sont rationnés. La queue devant les boutiques (otchered) devient durablement un spectacle quotidien en URSS, et une véritable institution, avec ses codes et ses coutumes (par exemple, la possibilité de s'éloigner sans perdre sa place).
En réaction au manque de nourriture, les cantines d'usine se multiplient[54], le chapardage sur les lieux de travail devient une pratique de survie banale et vigoureusement réprimée, le marché noir et les trafics en tout genre fleurissent, le règne du système D s'installe. L'inégalité devant le ravitaillement est considérable: il existe ainsi une quinzaine de catégories rien qu'au sein de la classe ouvrière. Quant aux dirigeants et la bureaucratie, ils ont accès aux magasins spéciaux bien approvisionnés[.
L’homo sovieticus ne peut espérer s'en sortir que s'il bénéficie de protections, d'un réseau de relations bien placées, du blat («piston») indispensable. Un proverbe populaire dit alors: «mieux vaut avoir 100 amis que 100 roubles». De véritables réseaux népotisme  se nouent à tous les échelons de la société soviétique[.




 



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